Giovedì, 10 Febbraio 2011 18:32

L’Eveil au pays des Neiges (Philippe Cornu)

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Au bouddhisme indien introduit au VIIe siècle, le Tibet a intégré ses croyances anciennes et des enseignements tantriques. Histoire d'une diffusion.

 Le Bouddhisme tibétain

L’Eveil au pays des Neiges

Philippe Cornu *

Complexe, le bouddhisme tibétain l'est certes. Mais à l'exception notable de l'école bönpo, toutes ses écoles se réclament du bouddhisme indien. Le bouddhisme tibétain n'est pas seulement tantrique (voir p. 34 et 35): par son monachisme, il se réclame du bouddhisme ancien, et par la philosophie et l'éthique, il appartient au Grand Véhicule. Au fil du temps, ses écoles ont émergé et, avec elles, l'originalité de ce bouddhisme qui a su intégrer les croyances anciennes du Tibet sans rien perdre de son authenticité.

Selon la légende, un reliquaire bouddhique serait descendu du ciel en 333 et le roi Lhathothori, n'en comprenant pas le sens, l'aurait pieusement conservé. Mais historiquement, le bouddhisme pénètre au Tibet sous le règne de Songtsen Gampo (569-650), par le biais de ses mariages, notamment avec la princesse bouddhiste chinoise Wangchen. Deux temples sont édifiés à Lhassa, le ]okhang et le Ramotché, et le ministre Thonmi Sambhota crée une grammaire tibétaine pour traduire les textes bouddhiques. Mais les croyances et l'ancien culte royal assuré par les prêtres shen et bön ne sont pas rejetés.

Une religion d'État

Le bouddhisme ne devient religion officielle au Tibet qu'au VIlle siècle. L'empereur Trisongdetsen (742-797) veut ériger un monastère à Samyé, près de Lhassa et confie la tâche à l'abbé indien Shantarakshita. Mais face aux obstacles spirituels et temporels, l'abbé suggère d'inviter Padmasambhava, un maître tantrique de l'Oddiyana (vallée de Swat, Pakistan) réputé pour son aptitude à subjuguer les forces négatives. Padmasambhava réussit, dit-on, à lever les obstacles. Après sa consécration vers 774, Samyé devient un grand centre de culture bouddhique:

Shantarakshita y ordonne les sept premiers moines tibétains et l'un d'eux, Pagor Vairocana, organise les équipes de traducteurs. Tiraillé entre les bouddhistes et les partisans de l'ancienne religion, Trisongdetsen abolit le bön royal et proclame le bouddhisme religion officielle. Ses successeurs poursuivent l'effort de traduction et renforcent la puissance des monastères. Trop sans doute, car au milieu du IXe siècle, Langdarma monte sur le trône, décidé à réprimer le pouvoir monastique. Après un bref règne, il est assassiné en 842 et la dynastie s'écroule. Il s'ensuit un siècle d'obscures luttes politiques marquant la fin de la première diffusion du bouddhisme au Tibet, dite des

« traductions anciennes », caractérisée par la traduction de nombreux textes canoniques et par la diffusion des premiers tantras et du dzogchen ou Grande Perfection.

La formation des écoles

À l'Ouest, soutenu par le roi du Gougué, le traducteur Rinchen Zangpo (958-1055) initie la

« seconde diffusion» du bouddhisme, inspirée par de nouveaux tantras découverts en Inde. Critiquées ou accusées de laxisme disciplinaire par les nouveaux adeptes monastiques de ce bouddhisme indien jugé plus orthodoxe, les lignées éparses de yogis laïcs issus de l'ancienne tradition vont se regrouper en école et s'appeler désormais Nyingmapa, « les Anciens» en se réclamant de la figure fondatrice de Guru Rinpoché (Padmasarnbhava). Des érudits comme Rongdzom Mahapandita (1012-1088) et Longchenpa (1308-1363) systématisent leurs enseignements et en prouvent l'orthodoxie. Avec la fondation du monastère de Kathok (Xlle siècle), l'école se dote d'un ordre monastique.

En 1040, Rinchen Zangpo invite Atisha, un maître indien dont l'influence est considérable. Son disciple Dromton fonde l'école Kadampa, « la lignée des Conseils Oraux », réputée pour sa discipline monastique rigoureuse et son entraînement de l'esprit à la compassion (lodjong). Ce courant, la toute première des écoles dites « nouvelles» (Sarmapa), va peu à peu se fondre dans les autres écoles nouvelles au point de disparaître au XIV siècle. Drokmi Shakya Yéshé, un autre traducteur tibétain du XIe siècle, ramène de l'Inde « La Voie et le fruit» (lamdré). Son disciple Khön Köntchok Gyalpo (1034-1102) fonde au Tibet central un monastère dénommé Sakya, donnant naissance à l'école Sakyapa, tradition à la fois scolastique et tantrique. Sakya Pandita (1182-1251), à l'heure où les Mongols menacent de fondre sur le Tibet, devient le maître du chef mongol Godan Khan et sauve le Tibet de la destruction. Son neveu Tchögyal P'akpa (1235-1280) est maître de

Kubilaï Khan, l'empereur fondateur de la dynastie mongole des Yuan en Chine, qui fait de lui le premier souverain à la fois spirituel et temporel du pays des Neiges.

Toujours au XIe siècle, Marpa le traducteur se rend en Inde et reçoit des yogis Naropa et Maitripa les Six Yogas de Naropa et le Mahamudra. Son disciple préféré Milarepa, célèbre yogi et poète, fonde l'école Kagyupa. Gampopa (1079-1173), étudiant de Milarepa, intègre les enseignements Kadampa à l'école. Ses disciples sont à l'origine des nombreuses branches de l'école. Parmi elles, les P'akmo Droupa sont un temps rois du Tibet à la suite des Sakyapa, et la branche Karma Kagyu dirigée par les Karmap, un temps alliée à des chefs mongols, faillit prendre le pouvoir avant de le céder aux Guélougpa après deux siècles d'âpres luttes (XVe-XVIe siècles). Enfin, la branche Droukpa Kagyu, « l'Ordre du Dragon », s'implante au Bhoutan au XVIIe siècle et y domine encore de nos jours le paysage religieux.

La toute dernière école, celle des Guélougpa, « les Vertueux », naît en 1409. Inspiré par les Kadampa, Djé Tsongkhapa (1357-1419) fait sa propre synthèse à partir des écoles antérieures et fonde le monastère de Ganden, instaurant un ordre exclusivement monastique. Après avoir lutté pour le pouvoir avec les Karma Kagyu, l'école Guélougpa triomphe au XVIIe siècle grâce au chef mongol Gushri Khan qui intronise le grand Ve dalaï-lama, Ngawang Lobsang Gyatso (1617-1682). Ce dernier se révèle être un grand homme politique et un mystique visionnaire qui encourage le renouveau de l'école Nyingmapa tout en imposant le pouvoir des Guélougpa au Tibet. .

 

 

* Chargé de cours en anthropologie religieuse à l'Inalco et président de l'université bouddhique européenne, il est l'auteur du Dictionnaire encyclopédique du bouddhisme (Seuil, 2006).

(Le monde des religions n. 30, pp. 22-35)

Letto 2501 volte Ultima modifica il Mercoledì, 13 Luglio 2011 22:57
Fausto Ferrari

Religioso Marista
Area Formazione ed Area Ecumene; Rubriche Dialoghi, Conoscere l'Ebraismo, Schegge, Input

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